Le nombre d’hectares de terre en zone agricole acquis par des spéculateurs dans 54 municipalités
du Québec entre 2009 et 2014 (2020)
Bien des efforts ont été faits depuis des siècles pour empêcher la privatisation des terres, notamment en les entourant de coutumes et de réglementations ou en créant des zones protégées. À cet égard, la terre se distingue d’autres ressources comme le maïs ou les diamants. On ne peut saisir le spectre complet de ce qu’est la terre si on la définit étroitement, comme une propriété que l’on peut posséder.

Depuis 2008, on constate partout dans le monde une augmentation de la superficie des terres agricoles acquises par des fonds de placement privés, des fonds de pension, des fonds spéculatifs et d’autres investisseurs institutionnels, tant nationaux qu’étrangers, à des fins d’agriculture industrielle et de spéculation à grande échelle. La cause immédiate de cet « accaparement de terres » était le krach boursier de la même année, qui a incité les investisseurs à chercher des endroits sûrs où stocker leur argent. En cause également, la flambée des prix des aliments en 2007-2008, qui a conduit les pays importateurs à envisager des façons de court-circuiter les marchés alimentaires mondiaux en s’engageant directement dans la production de nourriture.

Dans certains cas, les investisseurs exploitent directement les terres ou les louent à des agriculteurs qui les exploitent sous contrat, la vente de produits agricoles servant à récompenser les investisseurs. Dans d’autres cas, les spéculateurs misent sur la rareté des terres en espérant que leur valeur augmentera avec le temps. Enfin, certains investisseurs souhaitent simplement sortir leur argent de marchés volatils pour l’investir dans la terre en tant que catégorie d’actif permettant de diversifier leur portefeuille.

Les investisseurs font le pari aujourd’hui qu’une plus grande valeur sera générée demain et qu’ils continueront d’encaisser un minimum de bénéfices. Toute incertitude liée à la productivité et à la qualité doit être réduite - un mot d’ordre qui se traduit en une variété de stratégies, dont la concentration des entreprises, la recherche de rentes, la monoculture, les cultures polyvalentes et commerciales, et l’intégration verticale. Ces stratégies ont pour effets d’entraîner une augmentation du coût des terres, une réduction du nombre de fermes, une perte de diversité des cultures et de biodiversité, des chaînes de production orientées vers l’exportation et de possibles situations de monopsones, en plus de mettre en péril la souveraineté alimentaire locale. Ces pressions s’ajoutent aux contraintes déjà imposées par le régime agroalimentaire industriel aux fermes familiales.

Le nombre d’hectares de terre en zone agricole acquis par des spéculateurs dans 54 municipalités du Québec entre 2009 et 2014 comprend six compositions photographiques présentant la superficie de terre arable acquise par des acteurs financiers dans cinquante-quatre municipalités sur une période de cinq ans dans une région du Québec. Créés à l’échelle, chacun des assemblages en bois dans les images représente les contours d’une municipalité. Pendant cette période, cinq entreprises, ayant toutes leur siège social au Québec, ont acquis au total 2701 hectares dans cette région. Au cours de la même période, les quinze groupes financiers les plus actifs ont acquis plus de 27 000 hectares de terres agricoles dans la province.


Exposition


Le nombre d’hectares de terre en zone agricole acquis par des spéculateurs dans 54 municipalités du Québec entre 2009 et 2014, 2020, Séries of six impressions numériques. Dimensions 37 x 48.75 x 1.75 pouces. Vue d'installation, Fondation Grantham pour l'art et l'environnement.
En / Fr
Richard Ibghy & Marilou Lemmens
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